Arête des Ecandies

1er juillet 2013

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Vous l’aurez compris, je suis un peu une paresseuse et je m’ennuie vite. Mettre un pied devant l’autre me motive moyennement. C’était mal barré pour l’alpinisme. Et Dieu, ou Mère Nature ou l’Autre, je vous laisse décider, inventa le concept de la course de rocher. Le bonheur. Ça permet d’utiliser ses bras, son équilibre, sa souplesse, c’est drôle, parfois flippant, fatiguant, mais qu’est-ce que c’est bon !

Depuis notre dernière course d’arête, la traversée des Perrons, j’ai bien envie de refaire une course de rocher. Nous avions prévu le miroir d’Argentine, mais je crois que mon niveau de grimpe n’est pas encore suffisant, et puis le miroir n’est pas encore en conditions.

Jérôme, notre guide du jour, nous fait plusieurs propositions, parmi lesquelles la traversée des Ecandies. Et je dois vous dire un truc : ces Ecandies, ça a toujours été pour moi un rêve. Mais le niveau soutenu, le saut de l’ange et le rasoir m’avaient fait me dire que bon… ce ne serait pas pour tout de suite.

En même temps, c’est en faisant qu’on apprend et qu’on s’améliore non ? Je propose donc à Guillaume de se lancer dans ce beau projet. Départ aux aurores de la maison, arrivée en-dessus de Champex vers 7h. J’avais entendu dire que la marche d’approche est relativement longue. Elle fait un peu moins de 3h, mais c’est vrai que je n’ai plus l’habitude des longues marches et que ce n’est pas une promenade de santé ! Les débuts se passent bien, c’est un très joli sentier qui monte régulièrement et le panorama est magnifique.

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Nous arrivons au petit col, où nous décidons de faire une pause et de mettre nos crampons. 2 alpinistes nous rejoignent et nous dépassent. Apparemment nous seront seulement les 5 aujourd’hui, et ça me va bien. Je déteste la foule, encore plus sur la montagne (non mais quelle élitiste je peux faire !). De notre caillou, le col et le début de l’arête n’ont pas l’air très loin. Mais quand je vois nos 2 bioman alpinistes avancer lentement, je me dis que ça doit être une illusion. Je suis toujours une pive pour estimer les distances, alors quand en plus il y a de la neige, c’est même pas la peine.

Nous montons et je sens que ces derniers mètres vont me scier les pattes. Guillaume-le-chamois et Jérôme-la-piplette avancent devant comme s’ils étaient sur un tapis roulant, moi je me traine, je dégouline et je commence à trouver le temps long. Nous arrivons finalement au col et je me dis que les marches d’approche, c’est quand même ce qu’il y a de plus pénible !

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On s’encorde et on se met directement en jambe avec une première longueur de 5c. C’est juste 1-2 pas, mais franchement, à froid, moi je galère ! J’arrive tant bien que mal à me hisser vers le haut, et je me dis que la suite ne va pas être de la tarte. Après tout, cette course est cotée D (c’est fou comme une petite lettre peut vous donner du fil à retordre !!), et vu mon niveau en grimpe, je ne suis pas au bout de mes galères.

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Passé la première longueur, mes jambes et mes bras commencent à piger le concept de la course sur rocher et je me dépatouille pas trop mal. Mais voilà qu’un passage aérien m’attend. J’arrive à peine à m’agripper au rocher, qui arrive à hauteur de hanche, et je dois jouer les équilibristes. Je suis obligée de regarder où poser mes énooooooormes chaussures (bien-aimés chaussons dans mon sac, vous me manquez), et du coup je prends conscience du vide qui m’entoure et je flippe. Je fais ma Elise, crise de panique, enchaînement de « j’y arrive pas », « je sais pas comment faire » « non mais j’ai trop peur ». Pis bon, je me dis que j’ai quand même intérêt à avancer, après tout le rasoir et le saut de l’ange m’attendent… Mouais. Cet épisode n’a pas été le plus serein de ma vie !

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Les 2 types devant nous randonnent et ont pris de l’avance, nous en apercevons un sur le fameux rasoir. Wow ! Impressionnant quand même…

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Je me demande si mon pantalon va résister à l’épreuve du rasoir, car la couture arrière a bien vécu depuis le temps et mes nombreux passage en désescalade sur les fesses n’ont rien arrangé à l’affaire.

Jérôme installe une sangle et s’élance. Il hésite quand même un moment et y va à tâtons, ce qui  n’est pas rassurant quand on connaît son niveau de grimpe. Enfin bon il y arrive sans soucis et se met à califourchon sur le rasoir. Moi et mes jambes tremblantes on s’élance sans trop de conviction. Je tire sur les dégaines que Jérôme a eu la charité d’installer et je me hisse tant bien que mal Ouf ! Une chose de faite !

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Par contre, mes prédictions se sont révélées exactes, la couture de mon pantalon a lâché et heureusement qu’il n’y a que Guillaume pour contempler ma culotte pour le reste de la course…

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Après toutes ces émotions, Jérôme me dit qu’on a une heure « tranquille », et que le saut de l’ange c’est vers la fin. Ouf, une heure pour me retaper un peu… ce saut de l’ange, il me fait bien flipper, parce que ma peur du vide, je ne la gère qu’à moitié…

On en profite pour faire une pause, contempler le paysage. C’est juste sublime…

Jérôme se remet en route, et me dit qu’il y a une « petite enjambée » à passer. Ok. Je le regarde. Heu…

Petite enjambée ça ?! Mais alors c’est quoi le Saut de l’Ange ? j’ai pas d’ailes moi hein… Bon, je me dis qu’il faut que je prenne sur moi, et surtout que je ne me pose pas de question ! Jérôme dit à Guillaume de lâcher un peu de mou (ce serait con que la corde soit trop courte et brise mon élan quand même) et lui dit de bien être attentif. Gloups.

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Je m’avance sur la petite dalle qui s’incline légèrement vers les ténèbres le bas et 1, 2, 3, je saute ! En l’air, je me dis 2 choses :

  • Je vais réussir mon atterrissage
  • Jérôme est le roi des menteurs, parce que c’est pas du tout une enjambée !! je ne touche plus le sol ! C’est le saut de l’ange.

Je rejoins Jérôme et après quelques noms d’oiseau et les jambes flageolantes, je reprends mes esprits. C’était pas si pire finalement, c’est même un des passages que j’ai le mieux géré. Au tour de Guillaume ! Il ne se pose pas trop de questions et réussit à son tour le saut.

Le saut en vidéo

Nous poursuivons jusqu’au sommet, où quelques longueurs en 5c nous attendent. Les vicieuses, elles m’explosent les bras et ce n’est pas simple de trouver un rythme qui convient à Guillaume également.

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Après le sommet, les photos d’usage, les bonbons et la contemplation du panorama, nous nous mettons en route pour redescendre. Jérôme me mouline de 50m, Guillaume descend en rappel.

La suite de la descente se fait comme sur des roulettes, sauf qu’on n’a pas de roulettes, mais avec la neige, on descend sur les fesses et on glisse. Je dois régulièrement enlever les tonnes de neige qui se sont faufilé dans le trou de mon pantalon, mais cette technique est payante et nous permet de gagner du temps. Bien plus simple de se laisser glisser sur les fesses que de marcher sur de la caillasse… C’est quand même sympa ces courses de début de saison non ?

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Nous arrivons à la voiture après 11h de course. Evidemment, nous avons pris notre temps, et à 3 c’est toujours plus long qu’à 2, mais cette journée a été magnifique. Les Ecandies, c’était pour moi un vieux rêve. Je ne pensais pas être capable de faire une telle course. Pas le niveau en grimpe, plus le physique. Et surtout, la bonne vieille peur du vertige…

Finalement, nous y sommes arrivés. Avec un pantalon en moins pour moi, mais une sacré fierté et un immense bonheur en plus. Ça fait une jolie équation au final non ?

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