Pfriendler – Via Fritz
Ah, les Alpes uranaises. A chaque fois que je suis dans le coin, je suis comme une gamine tellement c’est beau. J’ai repéré une course qu’on peut faire à la journée du côté du Sustenpass. J’ai trop hâte, la neige en altitude nous oblige à être créatif et à trouver des idées de sorties pas trop craignos.
Afin de rentabiliser le trajet qui nous amène du côté du Col du Susten, de ses glaciers, ses paysages bucoliques et ses défilés de motards, Guillaume me propose une petite voie en dalle de 9 longueurs pour la fin de journée, Plattenweg. L’approche est courte et le bruit incessant des motards est couvert par le ruissellement des cascades environnantes.
Guillaume s’élance, quand vient mon tour je n’ai qu’une envie, tirer sur la dégaine, mais je me fais sermonner par Guillaume à qui rien n’échappe depuis le relais… Bon, il a raison, essayons de passer ça avec plus ou moins de grâce, d’autant que le caillou super abrasif est top pour les pieds et les adhérences. Je m’éclate, c’est ludique, et sans m’en rendre compte on arrive en-haut de la voie 2 petites heures après. Rappels, van, bière.
Les prévisions Météosuisse et les plans B
L’idée est de dormir dans le van pour attaquer la course du lendemain tôt et s’épargner une nuit en cabane. Vers 21h, Guillaume fait un dernier check météo (toute la semaine, la journée de vendredi était sensée être ensoleillée… ). Et là, c’est la douche froide. Enfin, la douche est sensée arrivée le lendemain, vers midi. Averses, orages… Notre course d’arête a l’air relativement longue, peu d’échappatoires… On hésite, on se dit qu’on est trop cons de pas avoir regardé la météo avant, on est dépités. On pèse les pour et les contre, et on décide de changer de plan et de partir sur une alternative plus safe. Encore faut-il la trouver. C’est sans compter sur Guillaume-les-bons-tuyaux, jamais à court d’idées !
Il me propose (sans aucun enthousiasme, car Guillaume déteste les changements de plans et les imprévus) une voie de 7 longueurs sur une montagne au nom imprononçable pour les non germanophones : le Pfriendler.
Guillaume est aussi motivé par cette nouvelle perspective que moi quand j’entre mon code de vérification pour remplir ma déclaration d’impôts. Evidemment, c’est un peu frustrant de devoir renoncer à la course de départ; mais moi, je me dis que ça pourra être l’occasion de faire de la chouette grimpe, et je suis plutôt contente !
La longueur de Sandrine
On se couche au col du Susten, c’est kékéland avec les pots d’échappement et les turbos, la nuit n’est pas follichone mais je relativise en me disant que je pourrais être dans une cabane à côté d’un ronfleur.
Selon les comptes-rendus, la voie est très populaire et fréquentée… On décide donc de partir vers 7h de la voiture, histoire de profiter de la fraîcheur du matin, de trouver une place de parc, de ne pas se retrouver coincés dans les bouchons de cordées et de ne pas se prendre le fameux orage.
L’approche de 45 minutes passe par des éboulis, je suis toujours aussi à l’aise dans ce genre de terrain… Mais bon, il fait frais, l’approche se fait à l’ombre et on arrive relativement rapidement au pied de la voie, pile au moment où le soleil est enfin sur le rocher. Une autre cordée est dans la voie d’à côté, et deux autres cordées arrivent derrière nous… Je sens qu’on a eu raison de partir tôt!
La première longueur est une 5b+, et quand vient mon tour, je galère bien, elle me cueille à froid, et je lui aurais volontiers confié un peu plus de prises pour les mains (heureusement qu’une petite dégaine salvatrice se trouve au bon endroit ;-)).
Guillaume, qui n’est toujours pas le type le plus enthousiaste de la journée, s’élance pour la seconde longueur. Elle est un peu moins difficile, et je commence à avoir de bonnes sensations, même si j’appréhende un peu car je sais que c’est ici que ma copine Sandrine a chuté et s’est cassé le pied. Je me demande comment elle a eu le courage de faire cette longueur en tête (et surtout se taper la descente dans le pierrier avec son pied cassé), moi je suis bien contente de la faire en moule.
Mais tout se passe bien, j’arrive vers Guillaume, toute contente d’être là. J’essaie d’être optimiste pour 2, et je vois qu’il commence presque à être content d’être ici. Faut dire que le cadre est grandiose, avec les sommets environnants enneigés et ce cadre bien alpin.
Les cheminées, c’est pas pour les grands
Plus les longueurs défilent, plus elles sont belles. C’est vraiment la classe, quand ça se raidit il y a des bonnes prises pour les mains, de jolis mouvements à faire.
Parfois, il y a aussi un peu de gaz et des longueurs plus verticales.
La quatrième longueur a un départ dans une cheminée, Guillaume et son 1m91 déteste ça, moi j’adore, même si ça fait “schouch scrouch” avec mon gros sac, mais c’est super ludique. La suite se redresse et je suis contente de ne pas avoir ce sentiment de vertige qui peut parfois me pourrir les courses.
Les dièdres, c’est la vie.
Ensuite nous partons pour un dièdre, pour moi la vraie longueur coup de cœur. C’est vraiment super cool, jamais trop dur. La cordée est bien derrière, personne ne nous gêne ou ne nous colle, c’est idéal.
La longueur suivante se raidit davantage, il y a un petit surplomb à passer, bien prisu, mais relativement physique. Des fissures, des dièdres, des surplombs, des dalles… franchement, il y a tout dans ces 7 longueurs, que demander de plus? (une journée sans orage, me répondrait probablement Guillaume).
Guillaume s’élance dans la dernière longueur, comme d’hab, sans souci. Pour moi cette longueur est un peu plus compliquée, je dois un peu zigzaguer et je ne suis pas très fluide – c’est le moins qu’on puisse dire. Mais je rejoins finalement Guillaume, moins de 3h après avoir commencé la voie.
Je rejoins le sommet par une mini grimpe facile et jette un coup d’oeil en arrière pendant que Guillaume me rejoint.
De là, deux possibilités pour la descente : parcourir une petite arête facile et rejoindre un sentier ou faire deux rappels et se retrouver quasi au pied des voies. Nous décidons de tirer 2 rappels pour arriver comme des fleurs sur le sentier. Le ciel est bleu, et notre plan A, même s’il est dans les nuages, n’est pas dans les orages. Aurions-nous dû maintenir? Devons-nous regretter? C’est difficile de ne pas avoir un petit sentiment de frustration, car ce n’est pas une course d’envergure, et que les créneaux sont peu nombreux pour profiter de belles journées en montagne. Mais cette journée avec Guillaume, et la découverte de cette via Fritz, a malgré tout été une belle journée.
Une petite course à la demi-journée, parfaite pour s’acclimater, travailler sa peur du vide, réviser ses manip et grimper dans un décor grandiose !
On file à la voiture, on s’arrête en route pour une bière et des röstis, un dernier coup d’oeil vers ces Alpes Uranaises, pour se dire qu’on vit décidément dans le plus beau pays du monde!
Infos et topo
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Le topo de C2C: https://www.camptocamp.org/routes/373983/fr/sustenpass-pfriendler-via-fritz
Topo du Club Alpin (si vous êtes membre): https://www.sac-cas.ch/fr/cabanes-et-courses/portail-des-courses-du-cas/pfriendler-3481/escalade-alpine/via-fritz-1171/
Pour manger des röstis vraiment incroyables et des gâteaux chocolat-framboise “traumshaft”, comme dit le patron, c’est ici : Das Rösti Restaurant (https://www.hotelterrasse.ch/)
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